La pêche au crabe de palétuvier sur la zone de Voh est une activité très développée. Elle est pratiquée principalement par les femmes des tribus de cette zone. La technique de pêche la plus utilisée est la pêche à pied au trou. C’est donc à partir des rendements (CPUE) de cette technique de pêche qu’un indice d’abondance du crabe de palétuvier a été construit. Les relations entre l’abondance de la ressource et les rendements ont été modélisées. Les différents facteurs spatiaux, temporels et halieutiques influençant les CPUE ont par ailleurs été déterminés ainsi que leurs effets en s’appuyant sur un système d’information géographique.
Distribution spatiale hétérogène : Une répartition spatiale hétérogène de la ressource (taille des crabes et rendements) a été mise en évidence sur la zone de Voh. Si les crabes capturés sont principalement des mâles, quel que soit le site de pêche, leur taille est distincte d’un site à l’autre : les sites localisés en mangrove côtière sont ceux où les crabes sont en moyenne les plus gros, en comparaison aux mangroves d’estuaires ou de bord de rivière. D’autre part, l’analyse de la densité de crabe montre que la densité de crabes est plus importante sur Vavouto, malgré une pression de pêche supérieure. Les sites de Vavouto semblent donc plus productifs que les autres sur le plan biologique, sans effet apparent de la pression de pêche actuelle. Conséquence de cette hétérogénéité de la répartition des crabes, l’accès des pêcheurs à la ressource est inégal (abondance et taille des individus) compte tenu de la forte territorialité de la pêche.
Mise en place d’un suivi participatif : La qualité des données recueillies par les pêcheurs de Voh permet d’envisager la mise en place de suivis participatifs basés sur l’analyse de CPUE d’un réseau de pêcheurs sentinelles. Ces suivis doivent impliquer un panel suffisant de pêcheurs, afin d’éviter d’éventuels « trous » dans le suivi. Ce suivi nécessiterait la mise en place de fiches de pêche individuelles par sortie et par zone, précisant le lieu, les heures de début et fin de pêche (qui permettront de déduire la durée de la sortie), le nombre et le poids total de crabes pêchés. A partir de ces données, il sera possible de calculer les CPUE en poids et nombre de crabes pêchés par heure, et donc d’estimer l’abondance et la biomasse de crabes pour la zone concernée.
Certaines contraintes relatives à l’estimation de l’abondance à partir des CPUE ont cependant été mises en évidence :
- Les CPUE ne sont plus proportionnelles à l’abondance des crabes à partir d’un seuil d’abondance : une saturation des CPUE est observée au-dessus d’une certaine abondance des crabes, à un niveau variable selon les zones (courbe en plateau – Figure 1). Les CPUE représenteraient ainsi un signal d’alerte plutôt dans le cas d’une diminution que d’une augmentation de la ressource ;
- Il serait préférable de calibrer au préalable les CPUE de chacun des pêcheurs impliqués dans le suivi ;
- Les valeurs d’abondance estimées à partir des CPUE sont des valeurs conservatives (càd sous-estimée) de l’abondance totale de crabes sur la zone, car les crabes hors trou ne sont pas comptabilisés via la calibration. Il s’agit souvent d’individus plus petits ;
- Enfin, du fait d’un meilleur ajustement, les CPUE en nombre de crabes pêchés par heure permettent d’estimer avec une meilleure fiabilité l’abondance de crabes dans les terriers.
La fréquence à laquelle les fiches de pêche devraient être complétées dépend de la précision voulue pour le suivi, du temps de travail imparti à l’analyse des fiches de pêche récoltées, et de l’implication des pêcheurs.
Enfin, certains des pêcheurs formés à l’utilisation d’un GPS lors de leurs sorties de pêche pourraient être mobilisés pour assurer un suivi plus précis de la population de crabes (toutes tailles incluses) dans certaines zones sensibles (par exemple dans la baie de Vavouto).
Relation entre l'abondance des crabes au trou et les rendendements de pêche (CPUE) sur les sites d'étude